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18 décembre est la journée internationale des travailleurs migrants
-Mathilde Tremblay, décembre 2022-
« Avez-vous déjà eu l’occasion de les voir arriver au Canada? Probablement que non, car la soirée est déjà avancée lorsque ces travailleurs étrangers descendent des véhicules jaunes qui les ont transportés de l’aéroport jusqu’à la ferme qui leur a été assignée.
Après un voyage ayant duré de longues heures, et après avoir reçu, au moment de mettre le pied à terre, des recommandations disciplinaires sur leurs obligations et leur comportement comme travailleurs saisonniers, les voilà qui arrivent à leur ferme. C’est l’heure où la campagne est enveloppée par l’obscurité, au fond du rang Saint-Jean-Baptiste, quelque part à Sherrington ou à Saint-Paul d’Abbotsford. À cette heure tardive, heureux sont ceux accueillis par leur employeur avec un goûter de bienvenue! Les autres, plus nombreux, iront au lit l’estomac creux, pour y passer leur première nuit dans leur « terre d’accueil ». Il est assez facile de s’imaginer le sentiment d’arrachement qui les envahit après les récentes séparations.
Par hasard, vous les avez déjà vus repartir, ces « oiseaux migrateurs », à la fin d’octobre, quand le sol est déjà blanc sous le givre du matin? Encore une fois, il est peu probable que nous ayons été là pour leur dire au revoir, car on les conduit généralement à l’aéroport avant le lever du jour. Après une dernière nuit d’attente, souvent sans même avoir occupé leurs lits puisque les draps sont déjà lavés et rangés, ils partiront fourbus par les mois de travail accompli. »
Des mots encore près de la réalité actuelle
Voilà les mots que Clément Bolduc, prêtre impliqué depuis plusieurs années auprès des travailleurs migrants saisonniers venus au Québec, écrivait en l’honneur de la Journée internationale des travailleurs migrants de 2004.
Dix-huit ans plus tard, cette journée du 18 décembre arrive à nouveau et il semble que le texte de M. Bolduc s’applique encore. Les personnes migrantes venues pour travailler au Québec demeurent méconnues. Néanmoins, la Journée internationale des travailleurs migrants est une opportunité de prendre le temps d’apprendre à connaître qui ils sont, dans quelles conditions ils vivent et travaillent ainsi que les combats qu’ils mènent actuellement pour se sentir mieux en terre québécoise.
Ces personnes migrantes viennent travailler au Québec souvent pour rapporter de l’argent à leur famille restée dans leur pays natal. Elles se déplacent par nécessité financière, mais ne sont admises à rester dans la province que de manière temporaire. Elles sont accueillies sous les conditions du Programme fédéral des travailleurs étrangers temporaires (PTET).
C’est là la source de nombreux malheurs. Les travailleurs migrants ne peuvent pas quitter leur emploi même si les conditions de travail et de logement y sont déplorables. S’ils ne remplissent pas leur contrat les liant à leur employeur, ils sont expulsés de la province. De là naissent abus, faible salaire, manipulation, etc. de la part de certains employeurs.
Pour faire souffler un vent nouveau
Même si de plus en plus d’employeurs et citoyens prennent l’initiative se faire proches de ces travailleurs et que leur présence est reconnue comme une source de richesse culturelle, la précarité dans laquelle ils vivent demeure.
Plus que jamais, les personnes migrantes venues pour travailler sont près d’obtenir le changement du programme PTET qui les rend si vulnérables aux abus. Depuis décembre 2021, le premier ministre Justin Trudeau a demandé l’analyse de la possibilité d’accorder le droit de résidence permanente aux travailleurs migrants. Ils ne seraient donc plus dépendants d’un employeur pour rester au Québec. Un tel changement apporterait certainement un vent de liberté et de soulagement sur les terres agricoles québécoises.
Pour l’instant, les résultats de l’analyse gouvernementale sont toujours en attente. Avec l’approche de la Journée internationale du 18 décembre, les manifestions pour le changement du PTET sont en marche et elles rassemblent québécois.es et migrant.es. Pour d’autres, cette journée est simplement une chance de reconnaître la présence de personnes venues de loin pour trouver du travail près de chez nous.
Ceux qui habitent les villages agricoles de la région peuvent passer à l’épicerie le jeudi soir qui, selon Clément Bolduc, est le moment où les travailleurs migrants se rendent en ville pour acheter ce dont ils ont besoin pour la semaine. Passez dire bonjour.